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  • FULVIO BELTRAMI

Burundi: le dilemme de Nkurunziza et de ses anciens parrains occidentaux (Fin.-)


Auteur: FULVIO BELTRAMI-

Fulvio Beltrami est un journaliste indépendant et reporter sur l’Afrique de l'Est pour les journaux italiens L'Indro et ReteLuna. Il est basé à Kampala en Ouganda

Tout droit dans les pas de Kabila

Si la reine des cœurs, Denise, ne suffisait pas pour remporter la main, Nkurunziza est propriétaire du Joker: Anicet Niyonkuru, secrétaire exécutif de la défunte plate-forme des opposants politiques en exil CNARED. Niyonkuru a rencontré à deux reprises des membres haut placés du régime. Premièrement à Nairobi en août et le second à Bujumbura en septembre. Les réunions étaient organisées par la faction modérée du CNDD-FDD et portaient sur l'étude de faisabilité d'un gouvernement d'union nationale du CNDD-CNARED.

Le plan évoqué par le roi-pasteur Nkurunziza semble être une variante du plan conçu par l'ancien président congolais Joseph Kabila, qui lui a permis de reporter les élections de 2016 à 2018.

Profitant de la présence des guérilleros RED Tabara et FOREBU sur le territoire national et après après s'être assuré que la candidature de son épouse n'est pas possible, Nkurunziza pourrait déclarer l'état d'urgence, reporter les élections, faire des "ouvertures" frontales et former un gouvernement d'union nationale avec ce qui reste du CNARED.

Un gouvernement d'union national pour sauver la democratie ou le système DD?

Sur le plan international, une telle initiative pourrait lui être bénéfique. Les concepteurs occidentaux de cette seconde option, des experts en diplomatie internationale qui penchent plus vers ce gouvernement d'union nationale, ont pour objectif de reconstruire une image du régime sur un ton modéré, donnant la fausse illusion d'un dialogue inclusif avec l'opposition et le désir d'un relâchement politique nécessaire pour un retour progressif vers une démocratisation progressive du pays.

En plus de sauver leur «enfant terrible», ces experts de la paix espèrent briser l’isolement politique et économique du régime burundais en réduisant la portée ou en annulant la prise des sanctions imposées par l’Union européenne afin de fournir le souffle économique vital pour le régime.

L’option gouvernement CNDD - CNARED est en réalité pleine d’obstacles et de difficultés. La plate-forme politique d'opposition, en exil en Belgique, a été affaiblie par plusieurs divisions et l'exode de nombreux membres au cours des derniers mois, y compris l'aile la plus radicale qui a toujours demandé l'arrestation de Nkurunziza et son procès pour crimes contre l'humanité.

Ces scissions ont transformé CANRED en une organisation dirigée par des leaders auto-représentatifs. Parmi les membres de la diaspora burundaise en Europe, le CNARED est perçu comme une fusion de politiciens opportunistes et corrompus, prêts même à prêter main-forte à ceux qui les ont forcés à l'exil pour obtenir un ministère ou une direction générale.

Ce n'est pas un hasard si les dirigeants du CNARED refusent de confirmer la possibilité d'entrer dans un gouvernement de transition. Ne pouvant nier les rencontres avec le régime, le CNARED affirme n'avoir traité que des questions relatives à la participation des partis d'opposition aux élections de 2020 rendue possible par l'abrogation des mandats d'arrêt, la possibilité de revenir au Burundi en toute sécurité et la disponibilité d'espaces politiques libres pour mener des campagnes électorales.

Même les parrains européens essaient de garder ce plan secret pour empêcher Nkurunziza d'être déchu par les durs de son parti. Les mêmes parrains auraient organisé une rencontre entre le général Evariste Ndayshimiye, secrétaire général du CNDD-FDD, et le président de la Commission de l'Union Africaine, dans le but de convaincre cette organisation qui s’était faite humiliée par Bujumbura de la volonté "sincère" du régime de surmonter la crise avec des ouvertures pour une opposition démocratique.

Les fuites des ces rapprochements ente le CNARED et les modérés du régime ont compliqué la mise en œuvre de l'ouverture démocratique trompeuse à l'opposition, alertant à la fois l'opposition politique armée et non inféodée au CNDD-FDD. Un gouvernement de transition hypothétique d'union nationale pourrait atténuer la pression internationale, mais ne pourrait pas résoudre la crise interne.

Le gouvernement éventuel ne serait pas accepté par les partis d’opposition qui ne sont pas en connivence avec le pouvoir et la société civile. Il ferait face à une guerre civile avec les groupes rebelles déjà présents dans le pays et devrait gérer la difficile cohabitation avec les milices Imbonerakure et les terroristes rwandais, les FDLR. Ces forces radicales ont accru leur contrôle sur le pays, grâce à la récente réorganisation du gouvernement et de l'armée ordonnée par Nkurunziza il y a deux semaines. Le gouvernement CNDD - CNARED ne ferait que atténuer temporairement les tensions internes tout en affichant son inefficacité, aggravant ainsi la situation politique et militaire.

Après l'invitation douteuse faite à Nkurunziza de participer à la conférence russo-africaine a la veille des attaques du RED Tabara, la Russie a réaffirmé son soutien aux autorités burundaises.

Sant'Egidio toujours derrière Nkurunziza

À la différence de la Russie, la Chine a choisi une politique prudente de silence afin d'éviter de compromettre la possibilité d'un partenariat économique avec de nouveaux gouvernements, après la défaite militaire du régime de Nkurunziza.

Les promoteurs du faux gouvernement d'union nationale se heurtent également à de grandes difficultés. Sant'Egidio, membre actif et prestigieux de l'Église catholique, ces parrains et sauveurs de Nkurunziza ont besoin du soutien des évêques et du nonce apostolique du Burundi. Les hiérarchies ecclésiastiques burundaises se sont alignées contre le régime et se préparent à assumer le rôle de leader de la manifestation, imitant les évêques catholiques du Congo qui ont dirigé les manifestations contre le président Kabila. Ce choix politique a déjà attiré l'ire du régime.

Ces "bâtisseurs" de la paix burundaise suscitent l’intérêt des gouvernements occidentaux, soucieux de comprendre les véritables raisons de cette initiative diplomatique. Les parrains de l'enfant terrible agissent dans l'ombre, dans les coulisses, avec des visites périodiques chez le dictateur burundais, sans en informer les évêques et le nonce apostolique.

Leur diplomatie secrète les amène à craindre constamment que leur soutien à un chef de guerre et à un criminel international allié aux terroristes des FDLR devienne de notoriété publique, risquant de compromettre la réputation internationale acquise par la promotion de la paix dans divers conflits africains, de l'Angola au Mozambique.

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